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Communiqué

Le 23 septembre 2014, le nouveau maire de Montréal, Denis Coderre, rendait public son Plan d’action montréalais en itinérance 2014-2017. Ambitieux, ce plan fut bien reçu. Deux ans plus tard, c’est un bilan partagé qu’il faut faire de son action.

De bonnes notes et de fausses notes en habitation, de bonnes intentions au niveau de la cohabitation et du profilage social, mais dont certaines tardent à se concrétiser. Une volonté d’acquérir plus de pouvoirs pour agir qui se confronte avec des moyens réduits de Québec et d’Ottawa.

À un an des élections et du terme de ce plan d’action, il reste encore bien du temps pour agir. Avec une situation qui demeure très difficile, l’action forte de la ville est toujours nécessaire.

Une itinérance en croissance

Le plan adopté par la ville en 2014 reconnaissait à raison la diversité des réalités de l’itinérance, sa présence concentrée au centre-ville, mais aussi de plus en plus visible ailleurs. Depuis, des démarches menées dans différents quartiers, dont Côte-des-Neiges et le Sud-Ouest, ont documenté cette réalité constatée par les organismes, la police et les services sociaux.

Pièce maîtresse de son Plan d’action, la tenue d’un dénombrement a été rapidement financée par la ville et exécutée le 24 mars 2015. Les résultats de cet exercice ont établi un chiffre, celui de 3 016 sans-abris dénombrés à cette date.

Le RAPSIM et de nombreux autres acteurs ont souligné la limite de cet exercice, qui sous-estime différentes populations, tant celles d’hommes et de femmes, jeunes mais aussi de plus âgés, qui se retrouvent dans la rue sans y être de façon chronique.

L’enjeu du nombre restreint issu du dénombrement est majeur, car il oriente les interventions vers l’itinérance chronique, priorise ainsi les budgets et néglige le travail de prévention. Oui, il faut viser à sortir les personnes qui sont à la rue, mais il faut prévenir qu’elles soient remplacées par d’autres. De même il faut répondre aux besoins des personnes en situation d’itinérance moins visibles (couchsurfing, suroccupation de logement, etc.)

Les propres chiffres compilés par la Ville de Montréal démontrent un accroissement de la fréquentation des ressources d’hébergement d’urgence, (en hausse de 10 % chez les hommes, 7 % chez les femmes). L’hiver dernier, un record de plus de 80 000 nuitées ont dû être offertes. Des données qui témoignent de l’importance d’agir aussi en prévention.

Logements pour sans-abri

Parmi les bonnes notes de la Ville, il y a le soutien à des projets de logements sociaux pour personnes itinérantes. En deux ans, plus de 15 organismes ont développé des projets qui ajouteront plus de 350 logements pour personnes en situation ou à risque d’itinérance.

L’avenir de ce développement s’annonce par contre difficile, car le gouvernement du Québec a coupé de moitié ses engagements pour de nouveaux logements sociaux, tout en réduisant la part de Montréal. Il y aura moins de logements sociaux pour sortir de la rue et pour éviter de s’y retrouver.

Pour ce qui est des maisons de chambres, bien que leur sauvegarde soit dans le Plande la Ville, l’érosion menace toujours ce parc qui constitue souvent un rempart contre la rue.

Un maire inclusif

À de nombreuses reprises, le maire a exprimé des propos visant l’inclusion de tous les citoyens, y compris ceux et celles qui n’ont pas de toit. Sa sortie rapide contre les pics anti-itinérants installés chez Archambault en témoigne bien.

Les objectifs de favoriser la cohabitation que l’on retrouve dans le Plan de la Ville se sont concrétisés dans les projets de réaménagement du Square Cabot et du Carré Viger. Les impacts de ces réaménagements ne sont pas sans heurts.

Toutefois, les impacts appréhendés de projets dont la future Stratégie centre-ville sont majeurs. Quelle place y aura-il dans ce Montréal de demain que l’on veut densifier, pour les personnes à faible revenu, pour les personnes itinérantes et pour les ressources leur venant en aide?

Un bilan manquant

Des progrès importants ont été réalisés quant à l’intervention de la police auprès des sans-abris, notamment avec ses équipes spéciales d’intervention. Le Plan de la Ville identifiait à raison la nécessité que le SPVM fasse le bilan public de son action en matière de profilage social. Or, deux ans plus tard, celui-ci n’a toujours pas été fait.

Et tout n’est pas réglé: trop de tickets sont encore donnés aux sans-abris et les relations demeurent difficiles. Le chef du SPVM donnait même raison au RAPSIM lors de la sortie de son 4e Rapport sur la situation dans l’espace public en février dernier.

Quelle action pour le Protecteur?

Une des actions centrales de la ville annoncées en 2014 était la nomination d’un Protecteur des personnes itinérantes. Il aura fallu attendre avril 2016 pour la nomination de Serge Lareault à ce titre. Le mandat de celui-ci s’est précisé, dont le pilotage d’une démarche menant à… un nouveau plan! On ne pourra reprocher au maire d’être proactif et de vouloir se donner une vision, mails il demeure que plusieurs des actions de son plan actuel restent toujours à réaliser sur le plan du logement, de la police, etc.

Plus de pouvoirs avec moins de moyens?

Finalement il faut rappeler les ambitions du maire de se donner plus de pouvoirs pour agir au niveau de l’itinérance. Son Plan de 2014 affirmait: «La reconnaissance par le gouvernement du Québec du statut de métropole pour Montréal est essentielle en cette matière (…) prémisses essentielles à toute intervention en matière d’itinérance». Ce statut n’est toujours pas obtenu.

Par ailleurs, depuis deux ans les budgets octroyés au niveau d’actions centrales dans la lutte contre l’itinérance ont été coupés. Autre tendance, la part de Montréal a été réduite. Ainsi le gouvernement du Québec a baissé de 3 000 à 1 500 unités le financement de nouveaux logements sociaux pour tout le Québec, la part de Montréal diminuant de 45 % à 36 %.

Bonne nouvelle: au fédéral, le gouvernement a augmenté de 50 % les fonds de saStratégie de partenariats de lutte contre l’itinérance pour 2016 -2018. Mais Montréal ne verra les fonds de ce programme augmenter seulement que de 36 %.

Depuis 30 ans, avec Jean Doré en 1986, les différents maires de Montréal ont tous apporté une attention importante à l’itinérance, avec un soutien variable à la lutte contre celle-ci. Avec Denis Coderre, la barre est plus haute, les objectifs plus ambitieux. Plus que jamais, le milieu communautaire et institutionnel est mobilisé, les besoins sont énormes, mais les moyens insuffisants. Le maire avait fait de l’itinérance une de ses priorités, avant même son élection. Bien du travail a été fait, mais beaucoup reste à faire. L’itinérance doit demeurer une priorité.

Lettre ouverte de Pierre Gaudreau, coordonnateur du RAPSIM, publiée dans le Huffington Post le 27 septembre 2016.

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