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Chronique

NOTE: la version anglaise du texte suit.
Lettre ouverte publiée dans Le Devoir le 27 septembre 2022

Le 29 mars dernier, le « Plan pour mettre en œuvre les changements nécessaires en santé » dorénavant appelé « Plan Dubé » était déposé. Le Ministre de la Santé et des Services sociaux, Christian Dubé y affirme qu’il mise « sur la pertinence, l’efficience et la création de valeur, dans le respect des principes qui me sont chers, et qui sont chers à notre société: l’universalité, l’accessibilité, l’équité et la qualité des soins » . Ces principes nous animent, et guident notre propre travail comme notre militantisme. Ils doivent servir de phare à toute décision politique en santé, petite ou grande; il en va de notre humanité commune.
La réorganisation annoncée contredit ces principes fondamentaux. À mi-chemin de la campagne électorale, il appert qu’ils ne guident pas non plus les orientations annoncées par la CAQ en matière de santé.

Universalité, accessibilité, équité et qualité? Voyons voir.

Parmi les manquements, force est de constater que rien n’est prévu pour garantir l’universalité des soins aux adultes dont le statut migratoire est précaire. Il est vrai qu’avec l’adoption, il y a un an, de la loi 83, les enfants peuvent désormais accéder au système de santé. Mais qu’en est-il de leurs parents, dont la santé est en péril faute d’avoir droit aux soins de santé, ou lorsque ces enfants atteignent 18 ans? La régularisation de tous les migrants précaires résoudrait le problème de l’accès universel aux soins de santé.
Le premier ministre Trudeau ayant chargé son ministre de l’Immigration de créer un programme donnant le statut de résident permanent aux personnes sans papiers, le gouvernement du Québec devrait soutenir et promouvoir cette initiative en facilitant l’octroi de la résidence permanente à tous les migrants précaires.
Le déni obstiné par la CAQ de la présence du racisme systémique n’exclut pas son existence au Québec. Le Plan Dubé et les engagements électoraux de la CAQ ne mentionnent aucune des recommandations mises de l’avant par la Nation Atikamekw pour mettre fin aux injustices que vivent les Autochtones au sein de notre système de santé.
C’est dans un Québec où le racisme systémique existe que Joyce Echaquan est décédée, victime de celui-ci, et ce silence est une violence de plus. Reconnaître le Principe de Joyce et l’appliquer dans toute réforme de la santé et des services sociaux doit aller de soi.
Bien que le Plan Dubé reconnaisse l’importance de « la réduction des inégalités sociales ayant une incidence sur la santé », il ne propose rien de concret pour les réduire. Actuellement, des populations marginalisées ne reçoivent pas des soins dignes et adéquats, dont les communautés LGBTQA2S, les communautés racialisées, les femmes et les hommes détenus, les personnes sans logement. Les personnes avec des limitations fonctionnelles recevront-elles enfin des soins de santé dignes et adéquats à domicile?

La privatisation vs les principes qui nous sont chers

Les générations futures paieront le prix du démantèlement du système public, déjà bien amorcé sous les gouvernements précédents et la CAQ propose de continuer de l’affaiblir.
Notre système de santé public n’est plus l’idéal rêvé pendant la Révolution tranquille. Il est victime de deux décennies de gestion néolibérale, de sous-financement chronique, de centralisation et de réformes bureaucratiques insensées. Il souffre du manque de respect et de considération pour ses travailleurs, qui y œuvrent avec tout leur cœur et leur compétence.
Les annonces de la CAQ vers une plus grande privatisation en santé auront des conséquences désastreuses sur l’universalité, l’équité, l’accessibilité et la qualité des soins en santé au Québec. D’après sa propre expérience face aux dépassements de coûts, le gouvernement sait que le recours au secteur privé pour remplacer le personnel du secteur public, n’est pas économiquement viable, ni socialement acceptable. Un regard au sud de la frontière suffit pour s’en convaincre.
La population mérite un système 100% public et cela demande de résoudre la pénurie de personnel soignant, en particulier le personnel infirmier, en investissant dans le secteur public d’abord et non dans le privé.

Loin de la démocratisation de la santé

Malgré que l’article 2 de la LSSSS garantisse la participation de la population à sa propre santé, physique comme mentale, rien n’est proposé pour travailler avec les communautés négligées et marginalisées, afin d’apprendre à rendre les soins de santé véritablement accessibles. La manière dont le Plan Dubé considère les organismes communautaires est d’ailleurs éloquente à cet égard, les comptant dans ses propres ressources, alors qu’ils sont autonomes.
En plus d’offrir à la population une autre réponse que celle du réseau, les groupes communautaires permettent la participation citoyenne aux décisions qui influencent leur santé. La démocratisation de la santé devrait être au cœur des décisions et de toute réforme, notamment en assurant l’autonomie des groupes communautaires et la poursuite de leurs activités, ainsi qu’en redonnant le pouvoir décisionnel aux communautés et au personnel soignant, par exemple comme à l’origine des CLSC.

Un plan dans un plan

À ces exemples d’incohérences entre ce que la CAQ envisage pour son prochain mandat, et les valeurs prônées par le Plan Dubé, s’ajoutent des annonces qui auront des conséquences sur le droit à la santé. Des baisses d’impôt annoncées, aux réticences à accueillir plus de 50 000 personnes immigrantes, les engagements de la CAQ nuiront à la société québécoise en général et au financement des services publics en particulier.
Plutôt que de stopper la démolition du système public de santé et de services sociaux, un gouvernement de la CAQ y contribuera largement, au mépris du choix de société qui est le nôtre depuis fort longtemps.

Elections and the Healthcare System: Fundamental principles at stake

On March 29th, the CAQ tabled its proposition for healthcare reform, the “Plan pour mettre en œuvre les changements nécessaires en santé,’’ to be referred to here as the Plan Dubé. The Minister of Health and Social Services, Christian Dubé, has stated that its focus is on “relevance, efficiency and the creation of value, in keeping with principles that are dear to me and to our society: universality, accessibility, equity and quality of care [translation].” These principles drive us, and guide our own work and activism. They must serve as a beacon for all health policy decisions, large or small. Our collective humanity is at stake.

The announced reorganization is inconsistent with these fundamental principles. Halfway through the election campaign, they do not appear to be guiding the CAQ’s orientation to health reform.

Universality, accessibility, equity and quality? We’ll see…

Among its shortcomings, it should be noted that there is no provision to guarantee universal coverage for adult migrants with precarious status. While last year’s adoption of Bill 83 granted healthcare access to migrant children, what about their parents, who are at risk without access to care? What about when those children turn 18? The regularization of all precarious migrants would solve the problem of universal access to health care. Prime Minister Trudeau having instructed his Minister of Immigration to create a program giving permanent resident status to undocumented persons, the Quebec government should endorse and promote this initiative by facilitating the granting of permanent residence to all precarious migrants.

The CAQ’s stubborn denial of the reality of systemic racism does not preclude its existence in Quebec. The Plan Dubé and the CAQ’s electoral commitments fail to mention any of the recommendations put forward by the Atikamekw Nation to end the injustices experienced by Indigenous people in our healthcare system. It is in Quebec where Joyce Echaquan died, a victim of systemic racism, and the silence on behalf of the CAQ is an extension of that violence. Acknowledging and implementing Joyce’s Principles should be self-evident in any healthcare and social service reforms.

Although the Plan Dubé recognizes the importance of “reducing social inequalities that affect health [translation],” it does not propose any concrete measures to do so. How and when will marginalized populations, including 2SLGBTQ+ communities, racialized communities, unhoused and incarcerated people receive dignified and adequate care? When will people with disabilities finally get the dignified home care they require?

Privatization vs. the principles we cherish

Future generations will pay the price of the dismantling of the public healthcare system, having begun under previous governments, with the CAQ proposing to weaken it further. Our public system no longer reflects the ideal of the “Quiet Revolution”; it is a victim of two decades of neoliberal management, chronic underfunding, centralization, and senseless bureaucratic reforms. It suffers from a lack of respect and disregard for its workers, who bring all their devotion and competence to their jobs.

The CAQ’s announcements of increased privatization will have disastrous consequences for universality, equity, accessibility and the quality of healthcare in Quebec. Based on its own experience with overspending, the government knows that replacing public- with private-sector personnel is not economically sound, nor is it socially acceptable. A look south of the border makes this clear. The population deserves a 100% public system, and this requires solving labour shortages, especially of nurses, by investing in the public system first and foremost, and not the private sector.

A long way from the democratization of healthcare

Despite the fact that section 2 of the LSSSS guarantees peoples’ participation in their own physical and mental health, there is no proposal to work with marginalized communities to make healthcare truly accessible. The contemptuous way the Plan Dubé treats community organizations speaks volumes, regarding them as government resources, even though they are autonomous. As well as offering an alternative response to peoples’ needs, these organizations allow citizens to take part in the decisions that affect their health. Democratization should be at the heart of all healthcare decisions and reforms, particularly by ensuring the autonomy of community groups and granting decision making to communities and healthcare workers, as was the case in the early days of CLSCs.

A plan within a plan

In addition to inconsistencies between what the CAQ envisions for its next mandate and the values represented in the Plan Dubé, other campaign announcements will also affect the right to health. From tax cuts, to the refusal to accommodate more than 50,000 immigrants, the CAQ’s commitments will negatively impact Quebec society in general, and the funding of public services in particular. Rather than ending the dismantling of our public healthcare and social services, a CAQ government will largely contribute to it, in defiance of what we have long chosen as a society.

Arnold Aberman MD, The Caring for Social Justice Collective

Me Lucie Lamarche, Ph.d., Ad.E., MSRC, Ligue des droits et libertés
Eloy Rivas-Sánchez, Solidarity Across Borders

Kat Stein, Health Services Director, Head & Hands

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